L'Union européenne a donc admis, en cette nuit du 7 au 8 mars 2016, que la Turquie lui est d'un grand secours, indispensable dans la crise des migrations. Que ce fût le sommet de la complaisance, rien d'étonnant puisque celle-ci dure depuis les années trente, renforcée durant la guerre froide. La complaisance envers les crimes contre l'humanité commis par l'Etat turc est vraisemblablement, même si c'est un non-dit, le principal élément du marchandage entre l'Europe et la Turquie. Fermer les yeux sur ce qui se passe à Sur, Cizre et ailleurs, c'est bien plus précieux pour Erdogan et Davutoglu que trois ou même six milliards d'euros.
Ce n'est pas étonnant, puisque la diplomatie est le domaine du calcul cynique. Mais pourquoi des éditorialistes très écoutés s'alignent-ils sur cette attitude alors qu'ils n'ont rien à perdre, eux? Pourquoi cette complaisance de certains médias?
Ce matin, je l'ai vue prendre tour à tour deux formes sur deux stations de radios publiques.
Le second exemple provient de France-Culture. Au cours de son éditorial, Brice Couturier, quant à lui, voyait comme obstacle à l'intégration de la Turquie certains manquements aux valeurs européennes. Jugement lui aussi plus que fondé. Mais il citait comme exemple, uniquement, des manquements à la liberté de la presse. Il pensait sans doute à la mise sous tutelle judiciaire, quelques jours plus tôt, du quotidien Zaman - un règlement de comptes entre islamistes, au fond. C'est dire qu'à ses yeux, et aux yeux des dirigeants européens, la destruction
Voyez sur ce vidéo-reportage signé Fatih Pınar (sous-titré en anglais) ce que l'Europe pardonne aux dirigeants turcs, pour qu'elle accepte le marchandage concernant les réfugiés. La ville de Cizre (prononcer "Djizré"), située sur la frontière turco-syrienne, a subi pendant 79 jours un couvre-feu avec interdition de sortir dans la rue. Sous prétexte de présence de combattants du PKK, la ville a été soumise aux exactions de toutes sortes des milices et des "corps spéciaux" de la police, qui n'ont fait nulle différence entre les combattants et les civils - y compris enfants et vieillards. Le centre-ville est détruit, comme l'est également le centre historique de Diyarbakir, la plus grande ville kurde.
Lisez également l'important article rassemblant des témoignages sur Cizre traduits par Naz Öke dans l'excellent kedistan.f.
Des journalistes témoins racontent Cizre | KEDISTAN
Cizre s'est enfin ré ouvert aux journalistes. Les comptes rendus, les images qui nous reviennent sont terrifiants, alarmants et extrêmement noirs. Des témoins de l'horreur. Nous relayons deux ...
http://www.kedistan.net/2016/03/07/temoins-journalistes-a-cizre/