Après le long détour par l'Allemagne pour explorer la notion de culpabilité, nous allons nous rapprocher de l'oeil de la spirale pour examiner le jugement des génocidaires à Istanbul, en 1919, en particulier avec les ouvrages de Vahakn Dadrian, Taner Akçam et Sévane Garibian.
Très tôt, le crime était connu par le Livre Bleu du gouvernement britannique, publié en 1916 en anglais et en 1917 en français ; par le Rapport secret de Johannes Lepsius en Allemagne en 1916 ; le livre du juriste russe André Mandelstam, Le Sort de l'empire ottoman paru en 1917 chez Payot y consacrait tout un chapitre (disponible en ligne : https://archive.org/details/lesortdelempireo00manduoft). La presse de l'époque a également largement fait état des massacres : V. Dadrian signale que de 1915 à 1922, le New York Times publie 194 articles sur la question, dont 70 % dans les quatre premières pages (Dadrian et Akçam, Jugement à Istanbul, 42).
Crime contre l'humanité et principe d'impunité
C'est dans ce contexte que naît la notion de « crime contre l'humanité ». Le 24 mai 1915, les Alliés avaient émis une déclaration directement liée à l'accomplissement du génocide, à la fin de laquelle on remarquera l'expression de « crime de lèse-humanité » :
« Les gouvernements de France, d’Angleterre et de Russie ont décidé en commun accord de faire les déclarations suivantes : Depuis un mois, les populations turque et kurde, de concert avec les agents du gouvernement turc, et souvent avec leur aide, sont en train de massacrer les Arméniens. En particulier, des massacres ont eu lieu vers la mi-avril, à Erzeroum, Terdjan, Bitlis, Mouch, Sassoun, Zeïtoun et dans toute la Cilicie. Dans les environs de Van, la population de plus de cent villages a été massacrée en masse. Le gouvernement turc est aussi en train de persécuter la population arménienne inoffensive de la capitale. Devant ce nouveau crime de lèse-humanité perpétré par les Turcs, les puissances de l’Entente déclarent publiquement à la Sublime Porte qu’elles en tiendront personnellement responsables les membres du gouvernement ainsi que tous ceux qui auront participé à ces massacres » (Chaliand et Ternon, Le génocide, 45).
André Mandelstam a utilisé cette même formulation dans son ouvrage de 1917 dont un chapitre est intitulé « La guerre mondiale envisagée comme lutte pour le droit humain ». On considère souvent que la notion de crime contre l'humanité a été introduite dans le droit international par l'article 230 du traité de Sèvres (10 août 1920). Elle n'y apparaît qu'implicitement, mais le traité prévoit le droit, pour les puissances alliées, de juger les responsables des massacres. Il ne s'agirait que d'une « justice des vainqueurs » si l'article ne stipulait également que, « dans le cas où la Société des Nations aurait constitué en temps utile un tribunal compétent pour juger lesdits massacres, les Puissances alliées se réservent le droit de déférer lesdits accusés devant ce tribunal et le Gouvernement ottoman s'engage également à reconnaître ce tribunal ». Cette disposition opère ainsi un glissement d'une justice de vainqueurs à une justice internationale, supposément impartiale, qui préfigurerait le Tribunal pénal international pour la Yougoslavie (1993) puis la Cour pénale internationale dont la création a été ratifiée par 60 États en 2002.
Si la notion est née, son application est restée lettre morte dans le cas du génocide des Arméniens, et c'est par des tribunaux turcs qu'une partie des responsables a été jugée. Taner Akçam, à la fin de son livre Un acte honteux, estime que la montagne a accouché d'une souris puisque ces procès ont abouti à un nombre limité de condamnations, et que les trois principaux responsables condamnés à mort, Talaat, Cemal et Enver, ont échappé à l'exécution de la sentence par la justice. Le livre commun de Vahakn Dadrian et Taner Akçam, Jugement à Istanbul, considère également que justice n'a pas été rendue. De fait, les procès d'Istanbul, en restant limités à quelques personnes et leurs sentences restant souvent lettre morte, constituent une parenthèse qui a été vite refermée par le kémalisme. Après 1919 et jusqu'à aujourd'hui, c'est le principe de l'impunité qui a prévalu, « une sorte de récompense négative en faveur des auteurs du génocide », mais aussi, peut-on rajouter, en faveur des auteurs de tous les massacres et pogroms commis antérieurement à l'encontre des Arméniens et des orthodoxes de l'empire, puis, postérieurement sous la république, à l'encontre des Arméniens, des orthodoxes, des Alévis et des Kurdes.
Ce principe d'impunité est extrêmement important pour la compréhension de la Turquie moderne, car il fonde un droit et un encouragement implicites au recours à la violence dans le règlement des conflits, violence qui peut même être parée de vertu une fois qu'elle est « légitimée » par l'idée de nation. Ainsi la violence a-t-elle continuellement encouragé la violence, jusqu'à nos jours.
Pourtant cette courte parenthèse de 1918-1919 est cruciale, malgré la déception qu'ont pu engendrer les jugements d'Istanbul. En effet, nous pouvons considérer les événements de manière rétroactive, avec nos yeux d'aujourd'hui, et nous serons alors étonnés par la liberté de parole et d'expression qui prévalait, à Istanbul, au sujet des massacres de masse de 1915.
Fin 1918 : accusation et transfert de blâme
On imagine mal, aujourd'hui, qu'un massacre (sans même parler de génocide) perpétré par des Turcs, sur ordre de leur propre gouvernement, soit ouvertement dénoncé dans la presse, en termes très durs. Ainsi, trois ans après les faits, pour la première et dernière fois, le génocide a été ouvertement discuté, détaillé, raconté, analysé et bien souvent condamné (Dadrian et Akçam, Jugement, 51).
En effet, la presse de la fin de l'année 1918 donne la parole à l'accusation ; ainsi Halide Edip [Adıvar], écrivaine féministe et par la suite opposante au kémalisme, écrit dans le quotidien Vakit le 21 octobre 1918 : « Nous avons massacré une population inoffensive. […] Nous avons essayé de détruire les Arméniens avec des méthodes caractéristiques du Moyen-Age. […] Nous vivons aujourd'hui les temps les plus tristes et les plus sombres de notre vie nationale » (Dadrian et Akçam, Jugement, 52). On peut lire dans Tasfiri Efkâr le 29 novembre 1918 : « Ceux qui sont responsables sont si nombreux qu'ils doivent être cherchés dans les plus hautes sphères de notre corps politique. Ils comprennent des ministres, des gouverneurs généraux, le parlement, spécialement les 250 membres de la Chambre des députés, et des fonctionnaires » (Dadrian et Akçam, Jugement, 53). Dans son numéro du 28 décembre 1918, Söz détaille sept catégories de coupables, anticipant les catégories énoncées par Karl Jaspers en 1946 : « 1) les auteurs principaux du crime ; 2) leurs complices, leurs soutiens, particulièrement les chefs provinciaux du parti et les membres du comité central du CUP ; 3) ceux qui ont été engagés dans des missions et opérations secrètes, composés des officiers de rang inférieur et des bagnards relâchés des prisons et des bravaches ; 4) des députés complaisants occupés à des activités affairistes ; 5) des journalistes et des flagorneurs ; 6) ceux qui ont été des profiteurs de guerre et par conséquent ont soutenu le régime ; 7) ceux parmi les flagorneurs qui ont fait cercle autour des pachas, des notables et des profiteurs » (id., 53-54). En somme, comme on peut lire dans Yeni Istanbul le 30 novembre 1918, « Nous sommes tous des massacreurs » (id., 53).
Mais il est vrai qu'à l'inverse, dès 1918, beaucoup s'engageaient parallèlement dans la grande opération de « transfert de blâme » qui dure toujours. J'ai déjà évoqué ce mécanisme de défense dans un article antérieur. Tant dans la presse qu'à l'Assemblée, des journalistes ou députés se sont évertués, tout en reconnaissant le crime, à en faire porter la faute « à des nouveaux convertis qui appartenaient à d'autres nationalités » (Dadrian et Akçam, Jugement, 55). Dans Alemdar du 11 juillet 1920, le député Rıza Tevfik [Bölükbası] rejette la faute sur les immigrés des Balkans et du Caucase : « La majorité, peut-être 99,5 % de ces brigands sont des non-Turcs, en tout cas pas des Turcs anatoliens » (id., 56). Surtout, le transfert de blâme revêt une fonction politique car il permet d'accuser l'équipe des Jeunes-Turcs, qui avait perdu le pouvoir et dont on pouvait facilement se désolidariser ; même le député arménien d'Alep, Artin Bosgezenyan, affirme le 4 novembre 1918 que ce n'est pas la nation turque qui est en cause, mais seulement l'ancien gouvernement et l'ancienne administration des Jeunes-Turcs (Akçam, Un acte honteux, 275).
Cette stratégie consistant à exonérer la nation turque en chargeant uniquement un groupe de dirigeants était capitale. Elle permettait de désigner le gouvernement unioniste comme bouc émissaire, de livrer en quelque sorte ses membres à la justice des Alliés, en espérant la mansuétude de ceux-ci pour le peuple turc ou la nation turque. Cet espoir a été ruiné par le traité de Sèvres (10 août 1920), qui prévoyait la quasi-disparition de la Turquie par le partage de l'Anatolie : il n'y avait alors plus rien à perdre et les nationalistes ont pu commencer à assumer le génocide, car le traité de Sèvres leur semblait donner raison aux assassins, puis à le nier.
Il reste que le débat de 1918-1919, ouvert à ce point que des députés arméniens, s'exprimant en tant qu’Arméniens, aient pu se permettre de dénoncer à la Chambre le meurtre de centaines de milliers de personnes de leur propre communauté, paraît aujourd'hui extraordinaire. Artin Bosgezenyan, au cours du même discours du 4 novembre, accuse : « Le nombre de foyers brûlés ou détruits est incalculable. [En plus de l'abrogation de la loi provisoire de 1915, qui couvrait les massacres], nous devons prendre des mesures pour châtier, sans exception, tous ceux qui ont détruit le pays en s'appuyant sur cette loi. […] On ne réglera pas l'affaire en se contentant de ranger les armes » (Akçam, Un acte honteux, 273). Quelques jours plus tard, le 9 novembre, le député arménien Barsamyan présentait une motion rédigée par le député de Mus (Mouch), Kegham Der Garabedyan, décédé quelques jours plus tôt, dont le contenu est aujourd'hui imprononçable en Turquie : « Comment était-il possible qu'un nombre aussi conséquent d'innocents Arméniens, des gens qui n'étaient impliqués dans aucun crime, aient été tués ? Le djihad déclaré, plus de 1,5 millions de personnes furent dispersées, tuées et à la fin détruites. […] Dans mon propre district, incluant Mus, Bitlis et les alentours, le massacre de masse fut exécuté avec une sauvagerie jusqu'ici sans exemple dans l'histoire ». Der Garabedyan dénonce sans détour les méthodes de massacre, le pillage des propriétés et des biens, la profanation des édifices de culte (Dadrian et Akçam, Jugement, 63-64; voir aussi Ter Minassian 2014). De même, Nalbandyan, député de Kozan, lors de la dernière séance de la Chambre avant sa dissolution, le 12 décembre 1918, se démarquant du « transfert de blâme » sur les seuls Unionistes, n'hésite pas à affirmer : « Même si de nombreux Turcs se sont opposés aux récurrentes atrocités anti-arméniennes, le fait est cependant que ces atrocités ont été commises au nom de la nation turque (Türklügün namına) » (Dadrian et Akçam, Jugement, 68). Les députés orthodoxes ne sont pas en reste, et le 12 décembre 1918, le député de Tekirdag, Dimistakli Efkalidis, dénonce la déportation des orthodoxes de son district avant la guerre, et dénie la pertinence de la comparaison entre les maux des Turcs et les massacres de masse, qui est l'autre stratégie de défense très employée par la suite dans le discours négationniste (« Nous avons tous souffert, nous sommes quittes »).
Des débats semblables ont lieu au Sénat dont le président, Ahmet Rıza, ancien dirigeant du CUP, était pourtant opposé à la politique de déportation ; dans son discours inaugural du 4 novembre 1918, il dénonce « l'assassinat sauvage » qui a coûté la vie à « 800 000 de nos concitoyens arméniens » et, au cours des débats, il continue de dénoncer les atrocités « sans précédent dans l'histoire ottomane » (Dadrian et Akçam, Jugement, 73). Lors d'une séance mémorable, le 21 novembre, une des dénonciations les plus vives émane de Resit Akif Pacha, alors membre du Conseil d'Etat (Sura-yı Devlet) ; il a eu connaissance des télégrammes chiffrés ordonnant le génocide et maudit ouvertement la « clique fourbe » qui a « profané l'islam et l'espèce humaine tout entière » (séance du 21 novembre, Dadrian et Akçam, Jugement, 76). Mais ce même 21 novembre, d'autres sénateurs, au contraire, défendent la politique de déportation, comme Damat Ferit, futur sadrazam (premier ministre) : « Si nous avons expulsé un million d'Arméniens […] c'est qu'ils auraient bloqué nos routes et nos voies de transport, l'arrière de notre armée et ainsi mis en péril l'existence même de l'Etat » (id., 76). Le génocide comme une mesure de survie de la nation turque : cette idée, estime Akçam, jouissait d'un soutien populaire parmi les musulmans (Un acte honteux, 395).
Criminels ou « martyrs » ?
Mais le processus judiciaire se poursuivait. Du 6 novembre au 7 décembre 1918, un organisme spécial, le cinquième département d'investigation de la Chambre des députés, se réunissait, menant des auditions de ministres et de Said Halim, sadrazam au moment du génocide. Celui-ci admit sans équivoque que l'objectif réel des déportations était la tuerie, et à nouveau la notion de crime contre l'humanité apparaît dans les propos du président de la commission lui-même, Abdullah Azmi (Dadrian et Akçam, Jugement, 85).
Dans le même temps encore, une autre commission d'enquête spéciale, la « commission Mazhar », était formée par le gouvernement et se réunissait du 13 novembre 1918 à la mi-janvier 1919, collectant les récits de témoins parus dans la presse, les documents officiels (comme le témoignage capital du vali de Harput qui a conservé les télégrammes secrets de 1915) et procédant à des interrogatoires et des arrestations. Ainsi les préfets de Sivas, Diyarbakır, Harput et Mossoul, puis, sans doute sous la pression des Britanniques, des dirigeants du CUP et d'officiers supérieurs furent incarcérés en prison militaire. La réalité du crime étant prouvée, la suite devait porter sur les responsabilités précises (Dadrian et Akçam, Jugement, 88-98).
Le 14 décembre 1918, un décret signé du sadrazam annonçait l'intention des cours martiales de poursuivre et punir les crimes relatifs aux déportations et massacres des Arméniens. Le 16, le sultan approuvait cette mesure par un édit impérial ; les cours étaient en mesure de produire les preuves, en particulier les fameux télégrammes chiffrés et des témoignages obtenus lors des interrogatoires. Comme le spécifie V. Dadrian, les verdicts furent presque tous fondés sur des témoignages de musulmans : ainsi les procès ne pouvaient être considérés comme le résultat de la vengeance des Arméniens. D'autre part, les cours martiales étaient ouvertes à la presse et au public, pour prévenir le reproche de mener une justice de vainqueurs. Le tribunal rejeta la responsabilité de « provocations » arméniennes, arguant que, même au cas où elles auraient eu lieu, elles ne pouvaient justifier l'ampleur du crime (Dadrian et Akçam, Jugement, 151, 134).
La première condamnation à mort fut prononcée le 8 avril 1919 à l'encontre de Mehmet Kemal, kaymakam (sous-préfet) du district de Yozgat (Anatolie centrale), convaincu du crime de déportation des Arméniens dans l'intention de les massacrer, et d'incitation à la haine religieuse auprès des musulmans. Le 10 avril, il fut le premier exécuté, sur la place de Beyazit à Istanbul. Mais le déroulement des obsèques de Kemal révélait un inquiétant état d'esprit dans la population.
Car « la cérémonie funèbre le lendemain se transforma rapidement en une manifestation contre l'occupation. Selon le témoignage du capitaine britannique Hoyland, les couronnes portaient des inscriptions comme “Kemal Bey, le grand martyr des Turcs” et “Au martyr musulman innocent”. On prononça des discours nationalistes, hostiles aux Britanniques et à l'occupation (...) » (Akçam, Un acte honteux, 314). Le haut-commissaire britannique, Lord Calthorpe, observait que les obsèques furent « une spectaculaire et démonstrative procession. (…) L'auteur des crimes qui feraient frissonner n'importe quelle communauté civilisée a été traité comme un héros et un martyr parmi les musulmans ; mais ses victimes étaient chrétiennes ». Le turcologue et diplomate allemand Gotthard Jäschke, dans son ouvrage sur la guerre de Libération cité par Akçam, a souligné que la condamnation apparaissait à la population comme une concession aux Alliés, et fait sien cet avis du Foreign Office : « Pas un Turc sur mille n'estime qu'un Turc mérite d'être pendu pour avoir tué des chrétiens ».
Si l'on en croit le témoignage d'Ali Fuat [Türkgeldi], secrétaire particulier du sultan Vahideddin, ce dernier craignait, à la suite de la sentence de mort, un « massacre de vengeance » et c'est pourquoi il exigea du seyhülislam, le plus haut responsable religieux, une fatwa spécifique déclarant que l'exécution d'un musulman pour avoir assassiné un non-musulman était bien compatible avec l'islam. Cette fatwa fut bien émise... après l'exécution du jugement (Akçam, Un acte honteux, 314, et note 225 p. 465, et Dadrian et Akçam, Jugement, 99 et note 134 p. 362).
Nous n'avons là que des propos rapportés, des sources secondaires. Mais si ces témoignages sont corroborés, ils signalent l’adhésion d'au moins une partie de la population aux crimes de 1915, pour des raisons religieuses.
C'est au même moment historique que se constitue le mouvement national kémaliste, souvent perçu comme « jacobin » en Europe, qui en réalité a exploité le sentiment national-religieux si puissant dans la population, pour en faire sa base populaire. C'est ainsi que Mustafa Kemal adresse le 17 mars 1920 une circulaire aux provinces, par laquelle il est précisé que les non-musulmans ne seraient pas autorisés à participer au scrutin pour l'élection de l'Assemblée nationale d'Ankara : « Le mouvement national avait beau s'en défendre, il se définissait fondamentalement par la religion » (Akçam, Un acte honteux, 343). Ainsi dès ses débuts, le kémalisme instaurait une tension entre un discours officiel républicain, jacobin et non religieux, destiné à l'extérieur (et qui en effet a eu le don de plaire en Occident), et des actes qui fondaient la nation sur le critère de l'appartenance à l'islam. Le 27 juillet 1919, Mustafa Kemal rappelait dans un discours que la nation est constituée non seulement de Turcs, mais aussi de Kurdes, de Lazes, de Circassiens et autres, « tous ces peuples islamiques qui vivent au sein des frontières nationales et ont des droits égaux » (Akçam, Un acte honteux, 343-344). C'est seulement un peu plus tard que le kémalisme a préféré adopter des critères prétendument raciaux et forcer tous ces peuples musulmans à se considérer comme « Turcs », ce qui a d'une part mis le feu à la question kurde, et d'autre part renforcé la confusion déjà existante entre les mots « turc » et « musulman ».
Il est important de noter que la formulation de Mustafa Kemal de 1919 est exactement semblable à celle dont use fréquemment Recep Tayyip Erdogan quand il s'exprime sur l'unité du pays. Par exemple le 15 août 2005, lors de la cérémonie anniversaire de la fondation de l'AKP : « Les ethnies existent. Il y a des Kurdes, des Lazes, des Tcherkesses, des Géorgiens, des Albanais, des Bosniaques, des Turcs. Ce sont des sous-identités de notre nation. Mais il n'y a qu'une identité supérieure, c'est celle que confère la citoyenneté de la république de Turquie ». Ou encore le 22 mai 2017, lors du 3e congrès extraordinaire de l'AKP : « Nous sommes une seule nation, que nous soyons turc, kurde, tcherkesse, géorgien, abkhaze, rom, nous sommes 80 millions et une seule nation ». Le point commun entre Mustafa Kemal et Erdogan est frappant : ils reconnaissent la diversité ethnique du pays, mais en énumèrent seulement les composantes musulmanes. Erdogan ne dit pas explicitement que le ciment de ces groupes est l'islam, mais il l'exprime implicitement en ne mentionnant pas les non-musulmans. Les assertions des deux hommes scellent ainsi le nettoyage ethnique, puisque les Arméniens, les orthodoxes, les juifs et autres non-musulmans sont ainsi exclus de la nation.
La tension qui naît dès 1919 s'est renforcée durant tout le XXe siècle. La république a réussi à se faire passer pour laïque, alors qu'elle a été constituée sur un critère religieux par élimination systématique des populations non-musulmanes. La réaction de la foule lors des obsèques du kaymakam de Yozgat Mehmet Kemal, transformé en « martyr », annonce d'autres événements et d'autres massacres ; cette foule préfigure celle qui se rassembla à Sivas le 3 juillet 1993 pour mettre à mort des « athées » et des Alévis.
"Turcs, Kurdes, Arméniens sont frères". Affichette sur la place de Taksim durant le mouvement de Gezi, juin 2013. Photo E.C.
Maigre bilan pour une période exceptionnelle
La responsabilité des autorités centrales a été dénoncée et prouvée par une importante collection de documents officiels, produits au cours des procès, qui ont également mis en lumière l'inanité d'un des principaux arguments des organisateurs du génocide, la prétendue nécessité de protéger l'armée ou la nation d'une vaste trahison arménienne. (Dadrian et Akçam, Jugement, 111, 134).
Selon le décompte effectué par Taner Akçam, dix-huit accusés furent condamnés à la peine de mort par la cour martiale d'Istanbul, dont quinze par contumace ; trois responsables locaux seulement furent exécutés. Les trois plus hauts dirigeants ont échappé à la justice mais Talaat Pacha fut assassiné en 1921 à Berlin par un jeune Arménien ; Cemal Pacha fut lui aussi assassiné à Tiflis en juillet 1922 ; et Enver Pacha fut tué lors de combats en Russie en août 1922 (Dadrian et Akçam, Jugement, 209-211).
Le jugement de l'assassin de Talaat Pacha a été analysé par la juriste Sévane Garibian dans le cadre d'un ouvrage qu'elle a dirigé, La mort du bourreau (2016). L'assassin, Solomon Tehlirian, rescapé du génocide et dont toute la famille avait été exterminée en 1915, disait avoir agi sur injonction du cadavre de sa mère. Ayant accompli son acte le 15 mars 1921, il a été jugé dès le 3 juin. Tehlirian assume parfaitement son acte. De prestigieux experts sont convoqués pour le procès : le général Liman von Sanders, qui a passé toute la guerre en Turquie ; Johannes Lepsius, l'auteur du Rapport secret sur les massacres d'Arménie ; Krikor Balakian, évêque de l'Eglise arménienne, rescapé du génocide. Le public est nombreux et favorable à l'accusé. La procédure est conduite dans les règles et le tribunal n'est pas spécialement bienveillant : le président rappelle que nul ne doit faire justice lui-même, « même s'il a été outragé cruellement », et le procureur requiert la peine capitale.
Mais l'avocat Niemeyer emporte la conviction : ce procès « nous force à porter nos regards sur les causes lointaines du meurtre, à comprendre d'autres gens, d'autres peuples, d'autres circonstances et à les juger justement ». En quelque sorte, il en appelle à considérer les droits humains et pas seulement le droit allemand. Finalement, Tehlirian est acquitté sous les applaudissements du public, et la presse allemande, unanime, salue le verdict.
C'est un acte de justice extraordinaire, car l'accusé est acquitté, donc hors de cause, alors qu'il a été estimé sain d'esprit et assume son geste. Il n'y a même pas de peine symbolique. Pour Sévane Garibian, « Le verdict de non-culpabilité de l'assassin d'un bourreau préalablement condamné à mort par une juridiction de son pays, souligne, par ricochet, la culpabilité de ce dernier et de ses complices : l'acquittement de Tehlirian prend curieusement la forme d'une condamnation morale des responsables de crimes d'Etat » (Garibian, La mort du bourreau, 225). Il est possible que l'acquittement ait été partiellement motivé par des considérations politiques, les Allemands désirant se démarquer de leur ancien allié et rejeter la responsabilité de leur pays dans les massacres. Mais, selon S. Garibian, « le tribunal pardonne ici, justifie, voire d'une certaine manière sublime le geste fou d'un survivant qui dit répondre à l'injonction du cadavre de sa mère ». A travers ce procès et cet acquittement, tout se passe comme si, dès 1921, l'Allemagne avait juridiquement condamné la Turquie pour le génocide.
Le siècle de négation qui suit constitue donc un extraordinaire recul, puisque l'Etat républicain a amnistié les criminels, puis nié l'existence du crime, enfin a fait oublier ce qui a été débattu publiquement au cours de cette période clé : c'est comme si le processus judiciaire de l'époque était aujourd'hui nul et non avenu. A la mort de Talaat, le gouvernement d'Ankara avait décrété une journée de deuil national, et son corps a été ensuite inhumé en un lieu de commémoration officiel, le parc du monument de la Liberté (Abide-i Hürriyet) à Istanbul. Puis, la politique de négation systématique commençait, parallèlement à une entreprise d'effacement de l'histoire des peuples chrétiens d'Anatolie. La brève période au cours de laquelle la Turquie se regardait bien en face, celle où les Etats occidentaux la jugeaient sévèrement, était refermée. Tout cela rend beaucoup plus complexe la négation elle-même, qui ne s'arrête pas au crime, mais à la connaissance du crime, aux témoignages, et aux jugements. Comment aboutir à une telle dénégation multiple autrement que par un régime totalitaire ?
Dès l'époque des procès et surtout par la suite, la volonté des Alliés, qui pesaient sur l'Etat ottoman et ses tribunaux, a alimenté la suspicion du nationalisme turc : les dispositions du traité de Sèvres établissaient une justice de vainqueurs, partiale, l'accomplissement de la vengeance des Arméniens. L'occupation militaire de la capitale de l'Empire, les multiples liens créés entre les Alliés et les autorités, les pressions exercées sur le pouvoir ottoman en cette période de négociation du traité de paix, jettent en effet une ombre sur les procès. Car, comme le rappelle à plusieurs reprises V. Dadrian, les autorités ottomanes étaient tentées d'amadouer les vainqueurs en faisant des concessions, notamment sur cette question des procès.
L'accusation de justice partiale, avancée de façon récurrente dans le discours négationniste, repose sur une crainte réelle des gouvernants et responsables de l'époque de voir leur nation disparaître, et d'une volonté de se disculper face aux Alliés et à l'opinion mondiale. Mais cette attitude ne diminue en aucun cas la réalité des faits, comme l'a montré le témoignage de Sagırzade Sabit, ni les responsabilités. S'il est vrai qu'il s'agît d'une justice de vainqueurs, comme lors des procès de Nuremberg, c'est que les Alliés se font pour lors, et brièvement, les porte-parole d'une justice supérieure, internationale, et qui devait l'être, car le crime n'est pas seulement contre les Arméniens, c'est un crime de « lèse-humanité », selon la formulation de l'époque. Mais il est vrai également que les Alliés ont pu se retrancher derrière cette notion pour légitimer leur désir de dépecer l'Anatolie, ce que tendrait à prouver leur désintérêt ultérieur pour la question du génocide. Pour l'historiographie turque classique, les crimes turcs auraient simplement servi de prétexte pour justifier le démembrement. Nous avons là deux versions apparemment inconciliables de cette histoire, invoquant pour l'une le cynisme des puissances et pour l'autre l'accomplissement d'un devoir moral ; mais, plaide Taner Akçam, « il convient de réconcilier et de marier ces deux versions [car] leur puissante corrélation appartient inextricablement à la même histoire » (Akçam, Un acte honteux, 24).
Le discours négationniste est prêt
L'idée de coupure radicale entre l'empire ottoman et la république est une supercherie montée par les kémalistes, qui leur a permis (et leur permet toujours) de rejeter la responsabilité du génocide sur le gouvernement des prédécesseurs. La plupart des auteurs sérieux de la fin du XXe siècle ont montré à quel point la continuité existe, tant dans le personnel que dans la politique à l'égard des « biens abandonnés » par les Arméniens. En ce qui concerne la politique envers les Arméniens, il est bien connu désormais que la république n'a fait que poursuivre les persécutions. Dilek Güven en fait état dans son livre sur les pogroms anti-orthodoxes de 1955, montrant qu'il existe entre 1915 et 1955 toute une série de mesures qui attestent d'une continuité, notamment par une politique de migration forcée d'Arméniens entre 1929 et 1934 (Güven, Eylül Olayları, 103-106). Plus récemment, les travaux d'Ugur Ümit Üngör et Mehmet Polatel (2009) et de Taner Akçam et Ümit Kurt (2012) démontrent la continuité entre le régime des Unionistes et la république dans la politique de spoliation des « biens abandonnés » par les Arméniens. Cette politique a abouti à un gigantesque transfert de propriétés, enrichissant une partie de la bourgeoisie anatolienne, et une classe de profiteurs qui a du même coup été légalisée et s'est attachée au nouveau régime pour garder ses acquis. C'est ainsi que la Révolution française, par la vente aux enchères des biens nationaux confisqués à l'Eglise, s'était acquis le soutien d'une nouvelle bourgeoisie pour laquelle il était hors de question de revenir à l'Ancien régime.
On a vu qu'à l’époque des procès d'après-guerre le crime de 1915 est avoué ; la posture de négation pure et simple n'existe pratiquement pas, les témoins étant trop nombreux. La volonté génocidaire et le crime étant admis, plusieurs types de défense étaient possibles.
Le premier était de reconnaître ce qui s'était passé mais en attribuant une valeur positive à l'extermination des Arméniens ; il s'agit de la frange musulmane réactionnaire, rétrograde, obscurantiste, celle qui manifeste sa colère lors des obsèques du kaymakam Mehmet Kemal et en fait un martyr de l'islam et/ou de la nation. C'est une position à peu près inavouable en public et en politique. Mais par la suite, le pouvoir républicain est à l'écoute de cette population, en organisant une journée de deuil lors de la mort de Talaat Pacha, puis en amnistiant les responsables du génocide et les assassins. Aujourd'hui, cette attitude est toujours vivante, inavouable en politique, mais présente sur les réseaux sociaux ; des comptes Facebook continuent de féliciter Talaat, Enver et Cemal ; les mémoires des génocidaires, qui assument parfaitement ce qu'ils ont accompli, sont constamment republiés, et fort appréciés du public (Tasalp 2017). Beaucoup d'éléments portent à croire que si le génocide est un jour reconnu par la Turquie, ce ne sera pas du tout dans le sens espéré par les Arméniens et l'Occident. Ce sera pour dire « nous avons bien fait », soit dans un sens « musulman » (le génocide est une fetih au sens religieux, une conquête de territoire au profit de l'islam) ; soit dans un sens « national » (le génocide a sauvé l'armée et la nation en prévenant la trahison des Arméniens).
Le second type de défense est le transfert de blâme, qui, comme on l'a vu, consiste à admettre le crime mais en rejetant la responsabilité sur l'ancien gouvernement pour s'en démarquer, ou sur les populations nouvellement arrivées en Anatolie, Balkaniques ou Caucasiens, des gens désorientés, des pièces rapportées, des inconnus, qui, quoique musulmans, sont jugés trop peu turcs. Les « vrais » Turcs sont essentialisés par le nationalisme : le Turc est trop bon, trop civilisé pour commettre un tel acte.
La troisième défense est la relativisation comparative des maux, qu'on a vu en œuvre même en l'Allemagne, postérieurement au génocide des juifs : ils ont beaucoup souffert, mais nous aussi, et nous sommes quittes.
Aucune de ces postures ne nie les malheurs des Arméniens. Mais ces mécanismes de défense, exprimés dans la presse, à l'Assemblée et au Sénat en 1918 et 1919, forment la base de l'argumentation négationniste turque postérieure. En effet, tous ces arguments ressortent dans la littérature nationaliste à partir des années 1950, et, à partir des années 1980, dans les manuels scolaires d'histoire. Ils contribuent d'ailleurs à brouiller le discours officiel turc, qui évolue selon les époques entre une négation obstinée, voire un silence total, et la reconnaissance d'un désastre dans la population arménienne, qui ne serait pas du fait d'une politique génocidaire. Primo Levi a parfaitement exprimé ce genre d'incohérence dans la négation : « Tout se passe comme si quelqu'un criait : “Le massacre n'a jamais eu lieu, mais nous aimerions qu'il ait eu lieu et qu'il se perpétue“, ou : “Le massacre n'a pas eu lieu, mais nous le commettons de notre mieux“, en exigeant d'être cru. Un peu de cohérence, que diable ! Si vous aimez le massacre, pourquoi niez-vous son existence ? Et, si vous ne l'aimez pas, pourquoi l'imitez-vous et en faites-vous l'apologie ? » (Levi, L'Asymétrie et la vie, 128).
Tout est prêt. Le traité de Sèvres étant abrogé en 1923, ses dispositions concernant le jugement des génocidaires disparaissent comme si elles n'avaient jamais été formulées. Mais la première contre-attaque du gouvernement républicain ne consiste même pas en la négation du génocide. Il s'agit d'abord de rassurer la population, épuisée, déboussolée, ruinée, en leur répétant à toute occasion « Korkma ! N'aie pas peur ! » qui est le premier mot de l'hymne national adopté en 1921. Ensuite, de faire en sorte que chacun refoule son sentiment de culpabilité par rapport au sort des Arméniens disparus : ce sera le rôle du nationalisme, névrose qui rassure et légitime la violence commise en son nom et autorise les violences ultérieures. Enfin, le mieux n'est-il pas de faire disparaître l'existence des Arméniens et celle de tous les peuples non-musulmans d'Anatolie en étalant sur le pays une couverture « turque » par le remplacement des toponymes, et en effaçant totalement leur histoire ? Dès 1920, la branche d'Erzurum du Comité pour la défense des droits nationaux déclarait que « les provinces orientales sont le pays des Turcs depuis des temps immémoriaux […] et que les Arméniens n'ont donc aucun droit sur ces provinces » (Akçam, Un acte honteux, 337-338). Onze ans plus tard, l'histoire allait être scellée, verrouillée, dans le sens de cette assertion des nationalistes, et pour longtemps. La « réforme de l'histoire » allait être l'une des grandes « oeuvres » du kémalisme. Nationalisme et histoire seraient, dans le vingtième siècle turc, les masques de la violence.
Références
Akçam (Taner), Un Acte honteux. Le génocide arménien et la question de la responsabilité turque, Paris, Denoël, 2006.
Akçam (Taner), Kurt (Ümit), Kanunların Ruhu. Emval-i Metruke Kanunlarında Soykırımın Izini Sürmek [L'esprit des lois. Suivre les traces du génocide dans les lois sur les biens abandonnés], Istanbul, Iletisim, 2012.
Bruneau (Michel), De l'Asie Mineure à la Turquie, Paris, CNRS-Editions, 2015.
Chaliand (Gérard), Ternon (Yves), Le Génocide des Arméniens, Bruxelles, Complexe, 2006 (première édition 1980).
Dadrian (Vahakn), Akçam (Taner), Jugement à Istanbul. Le procès du génocide des Arméniens. Préface de Gérard Chaliand, La Tour d'Aigues, Editions de l'Aube, 2015 (2008, Bilgi University Press ; 2011 Zoryan Institute).
Garibian (Sévane), « 'Ordonné par le cadavre de ma mère'. Talaat Pacha, ou l'assassinat vengeur d'un condamné à mort », in Garibian (Sévane) (dir.), La Mort du bourreau. Réflexions interdisciplinaires sur le cadavre des criminels de masse, Paris, Pétra, 2016, 207-232.
Güven (Dilek), Cumhuriyet Dönemi Azınlık Politikaları Baglamında 6-7 Eylül Olayları [Les événements des 6-7 septembre dans le cadre de la politique républicaine envers les minorités], Istanbul, Tarih Vakfı, 2005.
Levi (Primo), « Chercheurs de mensonges pour nier l'Holocauste », in L'Asymétrie et la vie, Laffont, 2004. Texte original : La Stampa, 26 novembre 1980).
Tasalp (Duygu), « Les mémoires des Unionistes et le génocide arménien : Réflexion sur les concepts de responsabilité et de honte », http://repairfuture.net/index.php/fr/genocide-armenien-reconnaissance-et-reparations-point-de-vue-de-turquie/genocide-armenien-reflexions-sur-les-concepts-de-responsabilite-et-de-honte; mis en ligne le 19 janvier 2017.
Ter Minassian (Anahide), « Dadrak ou Mcho Kéram, observateur lucide d'un désastre annoncé » [biographie de Kegham Der Garabédian], in Mélanges Jean-Pierre Mahé. Travaux et mémoires, 18, Paris, Collège de France - CNRS (Centre d'histoire et civilisation de Byzance), 2014, pp. 623-648.
Üngör (Ugur Ümit), et Polatel (Mehmet), Confiscation and Destruction : The Young Turk Seizure of Armenian Property, Londres, Bloomsbury, 2011.
Esquisse n° 53 - Génocide : le chemin parcouru - Susam-Sokak
Jeunes Arméniennes à la manifestation des femmes, Istanbul, 8 mars 2014. Photo E.C. Le 17 février 2015, Libération publiait un texte de Cengiz Aktar intitulé " La malédiction turque ", un tex...
http://www.susam-sokak.fr/2015/02/esquisse-n-53-genocide-le-chemin-parcouru.html
En plus des quatre premiers articles de cette série "La violence et ses masques", vous pouvez lire également cet article de février 2015 qui retrace "le chemin parcouru" depuis les années 1990 (affaire Veinstein et attitude de la turcologie française, reconnaissance du génocide par la France, réactions turques en 1998...